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La polémique autour de l’offshore

La polémique autour de l’offshore
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En Europe et aux Etats-Unis, l’externalisation offshore est devenue un sujet de débat national qui a pris une grande ampleur. Conséquence positive de la mondialisation pour les uns, destructeur d’emplois pour les autres, ce thème a été longuement débattu lors de la campagne présidentielle américaine de 2004 par exemple.

Au niveau des entreprises, les décideurs sont aussi très partagés sur le bien-fondé des démarches d’externalisation offshore. Voyons les principaux arguments avancés par les défenseurs et les opposants à l’offshore outsourcing dans les entreprises et au niveau politiques.

Vision des entreprises

Un des soucis majeurs d’une entreprise est de conserver, voir d’améliorer, sa compétitivité. Dans le contexte de la mondialisation, il s’agit d’un défit constant qui condamne les dirigeants à recourir à tous les moyens qui sont à leur disposition.

L’externalisation offshore est un de ces moyens car il contient les promesses d’une baisse des coûts de production grâce au recours à une main d’œuvre moins chère, à qualification égale. Cette simple équation est très tentante et, même si nous savons que la réalité est plus complexe, il est justifié que les décideurs étudient les possibilités de recours à l’externalisation offshore pour certains processus ou certaines tâches internes.

Le tableau ci-dessous, extrait d’une étude de Gartner de mai 2004 (Gartner Research – Research Note - Weigh These Eight Factors Before Deciding to Go Offshore - P. Iyengar, R. Jester – 3 mai 2004), résume les arguments habituellement avancés par les défenseurs et les opposants à l’offshore.

Huit thèmes de discussions reviennent régulièrement dans les débats : le coût, la qualité, la maturité des processus, la protection de la propriété intellectuelle, la disponibilité des talents, la compréhension des affaires et de la culture du pays d’accueil, les risques, la dégradation du climat social.

Thèmes

Arguments en faveur de l’externalisation offshore

Arguments contre l’externalisation offshore

Coûts

Gains financiers.

Améliore la compétitivité  des entreprises, en particulier celles dont l’activité est très dépendante des systèmes d’information (hautes technologies, services financiers, Télécoms…).

Améliore la valeur des investissements publics pour le citoyen.

Le gain financier est contestable quand on prend en compte tous les coûts indirects.

Ce gain est négligeable, voir inexistant pour les petits projets.

Le gain financier est très variable d’un projet à l’autre. L’identification des bons projets candidats à l’externalisation offshore demande la mise en place d’une méthodologie éprouvée.

Qualité

Les fournisseurs offshores appliquent des normes élevées de qualité (CMM niveau 5).

Les employés des sociétés offshores sont très sensibilisés sur la qualité.

CMM n’est pas la panacée en terme de qualité quand les projets ne sont pas parfaitement définis.

Les méthodologies  qualité type CMM, même bien maîtrisées, ne garantissent pas que la qualité perçue par l’utilisateur finale soit bonne.

Maturité des processus

L’externalisation offshore oblige à renforcer ces processus, notamment, dans le développement logiciel, pour la spécification des besoins et la réception des livraisons.

Les fournisseurs locaux, non offshore, permettent une flexibilité bien plus importante dans les environnements peu structurés.

Protection de la propriété intellectuelle

La propriété intellectuelle et le capital intellectuel de l’entreprise peuvent être protégés par des mesures et des précautions adéquates.

L’outsourcing appauvrit l’entreprise qui perd peu à peu la maîtrise de son métier.

 

Disponibilité des talents

L’offshore outsourcing permet de mettre à disposition des entreprises un réservoir quasi inépuisable de ressources qualifiées.

Ceci fait que chaque tâche est exécutée par l’employé le plus efficace pour une tâche donnée.

Cet effet augmente encore la compétitivité des entreprises.

Cette disponibilité de talents au niveau mondial décourage les vocations dans le secteur informatique dans les pays développés.

Ce phénomène risque de freiner l’innovation dans les secteurs des hautes technologies, moteurs de la croissance.

Compréhension des affaires et de la culture locale

Les fournisseurs font des efforts pour maîtriser l’environnement de leurs clients en se renforçant sur la connaissance de leurs métiers et en nouant des partenariats avec des entreprises proches culturellement de leurs clients.

Les fournisseurs offshore manquent de connaissances de l’environnement de leur client et n’ont pas de personnel assez qualifié pour discuter efficacement à au niveau dans les entreprises clientes.

Risques

Les risques induits par l’offshore peuvent être maîtrisés, notamment en pratiquant le « Global sourcing » qui diversifie les sources d’approvisionnement.

Gartner prévoit qu’il y aura des disparitions de fournisseurs offshore importants en 2006.

Les risques incluent aussi les problèmes géopolitiques, les problèmes de sécurité et la protection des données.

Dégradation du climat social

La dégradation du climat social due au recourt à l’offshore peut être limitée par une communication claire sur la stratégie offshore de l’entreprise et un accompagnement du personnel concerné.

La mauvaise presse de l’offshore outsourcing dégrade le climat social dans les entreprises où les employés se sentent menacés

 

Débat politique

Au-delà des entreprises, l’offshore est devenu un enjeu politique, surtout aux USA pendant l’année 2004 de l’élection présidentielle. Les opposants à l’offshore accusent en en effet celui-ci de détruire massivement des emplois qualifiés dans les pays occidentaux.

Selon eux, le développement rapide de l’offshore causera à moyen terme des dommages très importants aux économies occidentales en faisant exploser le chômage, en creusant les déficits commerciaux et en rendant ces nations dépendantes des pays fournisseurs de services offshore.

Ils arguent que le modèle de l’offshore est basé sur un principe de commerce non équitable qui met en concurrence une main d’œuvre à bas prix, commode et disponible dans les pays en voie de développement avec des employés ayant un niveau de vie élevé et bénéficiant de protections sociales.

En somme, les détracteurs de l’offshore y voient une conséquence inattendue et non contrôlée de la mondialisation qui joue en défaveur des pays développés. Ils interpellent donc les Hommes politiques pour que des mesures protectionnistes soient prises dans les pays touchés, principalement les Etats-Unis, et que des règles soient édictés au niveau international.

Or, prendre des mesures contre l’offshore au niveau international semble impossible puisqu’il n’y a rien de contestable légalement à cette pratique qui respecte les lois du commerce et est régie par l’équilibre de l’offre et la demande.

Par contre les gouvernements, soucieux de répondre aux inquiétudes de leur électorat, ont  envisagé des actions pour limiter le phénomène.

Quelques exemples de projets de lois proposés dans certains pays développés :

  • Interdire le recours à l’offshore par les organismes publics, sauf si les entreprises locales n’ont pas les compétences suffisantes pour faire le projet ;
  • Imposer une taxe spéciale aux entreprises qui utilisent les services offshores ;
  • Alléger la taxation des entreprises ne recourant pas à l’offshore ;
  • Lister les entreprises externalisant certains services offshore dans une base de données accessible au public ;
  • Interdire la délocalisation de processus concernant des données sensibles ou d’ordre privé (comme les revenus personnels ou les données médicales) ;

 

En France, fin de 2004, un projet d’arrêté à été soumis afin d’obliger les opérateurs des centres d’appels de se localiser : le consommateur est alors informé quand son interlocuteur est situé hors des frontières.

En réalité ces menaces n’ont qu’un petit impact psychologique et n’ont pas remis en cause les projets d’externalisation, surtout ceux dont le périmètre n’affecte pas les clients finaux des entreprises.

Ces tentatives visant à freiner le phénomène semblent insignifiants : le recours à l’offshore est de mieux en mieux maîtrisé, autant du côté du client que de celui du fournisseur, ce qui fait que le nombre d’entreprises qui envisagent d’y recourir s’accroît sans cesse.

L’offshore constitue-t-il vraiment un mal ?

Les arguments des détracteurs correspondent-ils à la réalité ? À trop se focaliser sur la compétitivité, les pays développés sont-ils en train de perdre leur savoir-faire technologique au profit des pays en voie de développement ?

Les défendeurs du modèle offshore proposent une autre vision : pour eux l’offshore s’intègre au fonctionnement normal de la concurrence internationale et, comme pour d’autres activités économiques, apporte certains éléments négatifs, mais reste globalement très positif.

Concernant les pertes d’emplois, l’aspect le plus sensible de l’offshore, les défenseurs contestent les prévisions alarmistes de la presse faisant état d’une destruction de plusieurs millions d’emplois (3,3 millions d’ici 2015 selon Forrester Research).

En effet, Gartner estime à 300 000 les postes délocalisés dans le secteur informatique aux Etats-Unis entre 2000 et 2004 et le Groupe Alpha retient le chiffre de 100 000 emplois d’informaticiens américains délocalisés en 2005. Ces chiffres sont à rapprocher des 3,7 millions d’emplois effectifs du secteur informatique américain dans sont ensemble en 2003 et ne prennent pas en compte les créations d’emplois consécutives à l’offshore.

Les créations les plus directement lier à l’externalisation concernent les nouveaux profils qui s’avèrent nécessaires : des chefs de projets, des métiers intermédiaires qui font le lien entre le client et le fournisseur et des acheteurs par exemple. Le plus grand nombre de créations d’emplois sont la plupart indirectes : l’externalisation offshore permet aux entreprises d’accroître leur compétitivité et de se recentrer sur leur cœur de métier ; ces deux phénomènes conjugués leur permettent d’investir plus dans les domaines à plus forte valeur ajoutée et donc d’y créer des emplois.

Par ailleurs, l’externalisation offshore permet le développement d’une activité économique importante dans les pays fournisseurs ce qui génère des investissements, donc de l’activité pour les grandes entreprises internationales (infrastructure, énergie, Télécoms, BTP,….) qui sont, pour la plupart, situées dans les pays développés !

Le niveau de formation nécessaire à l’activité offshore dans le domaine informatique dynamise le tissu éducatif des pays en voie de développement et crée une nouvelle élite capable de stimuler l’économie de ces pays : de nouveau, quand les pays en voie de développement se développent, ils investissent et toute l’économie mondiale en profite, y compris et surtout les grandes entreprises occidentales qui créent alors des emplois.

Plutôt que de voir dans l’offshore un transfert pur et simple d’emplois depuis les pays développés vers les pays en voie de développement, voyons-y plutôt un moyen de développement à haute valeur ajoutée et « durable » pour les pays en voie de développement.

Au total, les projections faites prenantes en compte les destructions et les créations d’emplois que l’on pourra attribuer à l’externalisation offshore jusqu’en 2008 font état d’une création nette qui avoisinerait 317 000 emplois aux Etats-Unis. Quant à Mc Kinsey, le cabinet estime que pour 1 $ dépensé en offshore, 1,12 à 1,14 $ serait renvoyés aux USA et 0,33 $ resterait dans le pays fournisseur.

Au-delà de la bataille des chiffres, le comportement raisonnable pour un responsable d’entreprise où un Homme politique est d’admettre que le phénomène est en place et va se développer car les causes de son apparition s’intensifient (mondialisation, baisse des coûts des Télécoms, nouvelles technologies permettant le travail à distance, écarts de salaires à compétences égales entre les pays riches et les pays en voie de développement).

 

👉🏻  Mémoire de fin d'étude : Offshoring

       👉🏻  L’offshore dans le secteur des services

       👉🏻  Les sociétés de services poussées vers la délocalisation

       👉🏻  Les pays d'offshore : des destinations variées

       👉🏻  Les bénéfices de l'offshore

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